Le sujet du débat Bitcoin s’intensifie à l’échelle mondiale. Plusieurs gouvernements examinent aujourd’hui s’il faut imposer, interdire ou encourager l’achat ou la détention de bitcoins. Une controverse éclaire ce dilemme : le rôle des États face à un actif décentralisé.
Le débat Bitcoin reste vivant et pluriel
Entre volontarisme technologique et réalités fiscales, entre réserves symboliques et échecs imposés, chaque État navigue différemment.
El Salvador pivot stratégique
En septembre 2021, El Salvador a adopté Bitcoin comme monnaie légale, imposant aux commerces d’accepter BTC aux côtés du dollar américain. trois ans plus tard, cette décision a été abandonnée. En février 2025, le Parlement salvadorien a voté la suppression du caractère obligatoire de l’acceptation de Bitcoin, tout en maintenant — de façon volontaire — son statut de monnaie légale, sous pression du FMI dans le cadre d’un prêt de 1,4 milliard USD.
D’après le rapport de l’IMF publié en juillet 2025, le pays n’a pas acheté de nouveaux bitcoins depuis décembre 2024 . Cependant, les supposées acquisitions quotidiennes étaient en réalité des transferts internes entre portefeuilles gouvernementaux. En l’occurrence, sans injection de fonds publics.
Tour d’horizon du dossier salvadorien
En exploitation, l’usage de Bitcoin est resté marginal : 92 % des Salvadoriens ne l’avaient pas utilisé en 2024, et seuls 8 % l’avaient fait en moyenne une dizaine de fois par an. Le bilan économique est mitigé : économie digitalisée, investissement dans l’infrastructure, mais adoption limitée, volatilité, manque de confiance, critiques environnementales. Le FMI, après accord, a exigé la neutralité de la monnaie dans l’économie, ce qui a mis fin à l’expérience du « crypto‑État ».
États-Unis réserve Bitcoin : débat réglementaire
En mars 2025, le président Trump a signé un décret pour créer « Strategic Bitcoin Reserve« , alimentée par des bitcoins confisqués lors de procédures judiciaires. Ce stock, estimé à environ 200 000 BTC, soit plus de 17 milliards USD, doit être détenu à long terme sans vente, avec des acquisitions futures via stratégies budgétairement neutres.
L’initiative a suscité des critiques : certains soulignent l’absence de logique stratégique à conserver un actif extrêmement volatil sans utilité opérationnelle. D’autres craignent des conflits d’intérêts liés aux liens de l’administration avec l’industrie crypto. Toutefois, l’idée a gagné du terrain dans certains États comme New Hampshire, premier État américain à adopter une réserve crypto via une loi autorisant jusqu’à 5 % des fonds publics dans Bitcoin, devenue effective dès 60 jours après signature.
Europe et scandale tchèque
En Europe, le débat revêt une autre couleur. Le BTC reste exclu des réserves des banques centrales, jugé trop instable et incompatible avec la souveraineté monétaire du bloc européen. En République tchèque, un scandale a éclaté en mai 2025 lorsqu’un ministre a accepté un don en bitcoin sans vérification de son origine. Accusé de négligence et soupçonné de blanchiment, il a démissionné. Notamment en provoquant une motion de défiance, heureusement rejetée par le Parlement. Cette affaire renforce les préoccupations éthiques autour de l’usage d’actifs numériques par des responsables publics.
Enjeux et enseignements majeurs
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Utilité vs contrainte
Imposer ou encourager l’usage d’un actif crypto engendre des risques économiques et démocratiques. L’expérience salvadorienne montre qu’un modèle top‑down peut échouer si l’infrastructure sociale ou la confiance fait défaut.
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Réserves d’État symboliques
Détenir du BTC comme réserve nationale relève plus du signal politique que de l’outil macro‑économique classique. Les vétos à la vente et les stratégies d’acquisition budgétairement neutre tentent de limiter les risques pour les contribuables.
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Transparence et gouvernance
La gestion des actifs souverains en crypto exige des cadres robustes en gouvernance, stockage sécurisé, reporting public et conformité AML/CFT. Sans ces garde‑fous, les crises de confiance et abus institutionnels deviennent probables.
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Enfin, le débat Bitcoin reste vivant et pluriel. Les scandales publics rappellent la fragilité éthique des États lorsqu’ils dialoguent avec des actifs anonymes et numériques.